Entre cynisme américain et attentisme européen, l'Ukraine face à un été meurtrier
- Collectif Pour l'Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !
- 11 juil.
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : 13 sept.
Tribune parue dans Libération en date du 21 juillet 2025, sous le titre " Face au cynisme américain, l’Europe peut encore sortir de son attentisme pour éviter un été meurtrier à l’Ukraine "
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L'inflexion de Trump sur les livraisons d'armes est bienvenue, mais le délai accordé à Poutine ouvre tout l’été la voie à une offensive meurtrière des forces russes. Pendant que l'Europe s’assoupit dans les vacances, comment aider l'Ukraine à résister ?
Le président américain annonce désormais la reprise des livraisons d'armes – notamment les systèmes Patriot si cruellement nécessaires pour protéger les villes et les civils – via un système « Cash and Carry » : l'Europe paie, l’Amérique produit, livre et encaisse, l'Ukraine reçoit. Mais cette inflexion masque une réalité troublante.
Un piège mortel est tendu derrière cette offre. En accordant 50 jours au Kremlin pour instaurer un cessez-le-feu, Trump lui offre exactement le temps nécessaire pour mener à bien son offensive d'été. Pendant que les Européens s'apprêtent à partir en vacances, les carnassiers de Moscou, épaulés par 30 000 soldats nord-coréens, redoublent de voracité. L'économie russe vacille, mais Poutine veut une victoire militaire avant que les sanctions ne l'accablent, afin de décourager les alliés de Kyiv.
La contradiction est flagrante. Le 13 juillet, Emmanuel Macron proclamait devant les armées françaises que « la Russie constitue une menace existentielle qui pèse sur notre liberté ». Il annonçait un doublement du budget de la Défense d'ici 2027, atteignant 64 milliards d'euros. Mais quelle logique y aurait-il à construire une défense européenne qui n'inclue pas l'armée ukrainienne, la plus expérimentée au feu et la plus innovante du continent ? Quelle logique y aurait-il à invoquer une menace existentielle tout en refusant les mesures qui permettraient rapidement et à moindres frais de la conjurer en Ukraine ?
Contre l'attentisme européen, des solutions applicables rapidement.
Car ces solutions existent, juridiquement fondées et militairement efficaces, applicables dès maintenant. Elles ne ruineraient pas nos budgets, ne dégarniraient pas durablement nos arsenaux et ne risqueraient pas inconsidérément la vie de nos soldats.
La défense antiaérienne de l’Ukraine doit être renforcée au plus vite. Puiser dans les stocks européens des batteries Patriot et SAMP/T pour protéger les cités et installations énergétiques ne compromettrait pas notre sécurité. L'Allemagne s'est déjà engagée dans cette voie.
Activer le plan Skyshield permettrait d'interdire le ciel ukrainien aux missiles et drones russes sans confrontation directe avec l’agresseur. Environ 120 chasseurs européens répartis sur des bases OTAN de pays limitrophes suffiraient à protéger la moitié de l'espace aérien, capitale et centrales nucléaires comprises.
Confisquer les 210 milliards d'euros d'avoirs russes placés sous séquestre européenne s'impose pour financer la protection et la reconstruction de l’Ukraine. Le droit international l'autorise comme « contre-mesure » en cas d'agression.
Il faut en outre renforcer et faire respecter les sanctions économiques, en traquant les pétroliers de la « flotte fantôme » de Moscou, en lui fermant les détroits baltiques, en cessant les achats de gaz liquéfié et d'uranium. L'économie russe, au bord de la récession, ne résisterait pas à l’assèchement de sa rente énergétique.
Un contingent européen de surveillance peut être envoyé pour surveiller la frontière biélorusse, laissant ainsi des brigades ukrainiennes libres de se redéployer sur le front est.
Il importe enfin de se soucier du sort des gens. De prétendus « réalistes » s’effarouchent de « l’escalade », comme si elle était le fait des défenseurs d’une nation attaquée. Ces bons esprits prêchent l’abandon de territoires, alors que l’invasion russe ne vise pas seulement l’annexion de l’Ukraine mais la destruction totale de l’identité d’un peuple qui a choisi de déterminer librement son destin.
Comme le répète Oleksandra Matviichuk, présidente du Centre des libertés civiques de Kyiv, prix Nobel de la paix, il s’agit des enfants déportés en Russie, des civils détenus illégalement, des prisonniers de guerre soumis aux tortures et aux violences sexuelles, des millions de personnes qui vivent dans des zones grises. « People first ! », ajoute-t-elle. « Si l’on néglige cette dimension humaine, on ne trouvera jamais le chemin vers une paix durable. »
Cet été sera décisif. Poutine mise sur la lassitude occidentale et l'effet anesthésiant des congés pour réussir sa percée. Face à cette stratégie, l'Europe ne peut se contenter de constater la menace : elle doit agir. Le général Burkhard, chef d'état-major des armées françaises, l’a souligné : « la sécurité de l'Europe se joue en Ukraine ». Si l‘issue était une victoire russe, « on deviendrait les herbivores dans un monde de carnivores ». Cette lucidité stratégique doit se traduire par des actes politiques.
Le sursis offert à Poutine par Trump impose à l’Europe de saisir l’urgence du moment et d’agir sans délai. Dans 50 jours, si Poutine réussit son offensive d’été, il sera trop tard. L'Ukraine aura payé le prix de nos hésitations, entraînant dans son recul l'idée même d'une Europe libre et souveraine.
Les dirigeants européens peuvent encore marquer l'histoire du continent en forgeant une véritable coalition de volontaires, et non une ligue de velléitaires. C'est une question de vie et de mort pour l'Ukraine, sa population, sa langue et sa culture. C'est aussi une épreuve existentielle pour l'Europe qui se conçoit comme un espace de droit et de démocratie. L’Europe est seule, elle doit en prendre acte et se hisser à la hauteur de son destin.
L'Ukraine défend l'Europe contre la Russie. Mais qui protégera l'Europe contre son propre attentisme, quand chaque jour compte ?
Signataires
Tribune portée par :
Galia Ackerman, directrice de rédaction de Desk Russie
Vincent Desportes, Général de l’armée de terre (2S)
Antoine Garapon, magistrat
Ariane Mnouchkine, fondatrice et directrice du Théâtre du Soleil
Véronique Nahoum-Grappe, anthropologue
Pierre Raiman, historien, Vice-Président de Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !
Sylvie Rollet, professeure émérite des universités, Présidente de Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !
Dominique Schnapper, ancienne membre du Conseil constitutionnel
Olivier Védrine, politologue, administrateur de l’association Jean Monnet
Emmanuel Wallon, professeur émérite des universités en sociologie politique

Premiers signataires
Vincent Amiel, professeur émérite de cinéma et des médias
Jean-Pierre Andrevon, écrivain
Antoine Arjakovsky, directeur de recherche au Collège des Bernardins
Monique Barbaroux, administratrice de l'État honoraire
Pierre Bayard, professeur d'université émérite
Yves Beguin, professeur émérite d'hématologie, Belgique
Anne E. Berger, Professeure émérite de littérature française et d’études de genre
Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis
Bernard Bret, professeur des Universités (en retraite) géographe
Jean-Marie Brohm, sociologue, professeur émérite des universités
Michel Caillouet, ex-ambassadeur auprès de l'Union Européenne
Anne Carion, éditeur
Barbara Cassin, philosophe
Anne et Laurent Champs-Massart, auteurs en littérature
Henriette Chardak, écrivain, journaliste, réalisatrice
Gilles Chevalier, contrôleur général des armées (2S)
Denise Anne Clavilier, historienne et blogueuse
Yan Ciret, écrivain, commissaire d'exposition, documentariste Radio France
Michel Cogné, professeur de médecine
Michel Collot, professeur des universités émérite
André Constantinesco, professeur honoraire médecine
David Copello, politiste
Maïté Coppey, directeur de recherche émérite Inserm
Bertrand de Cordoue, ingénieur général de l'armement
Didier Coureau, Professeur en études cinématographiques Université Grenoble Alpes
Cathie Dambel, cinéaste
Jérôme Enrico, cinéaste
Karen Entrialgo, professeure à l'Université de Porto-Rico en Arecibo
Sébastien Espinet, économiste
Kseniia Ermoshina, Chargée de recherche, CNRS
Scott Erwin, économiste, ministère de la Santé du Québec
Christine Fleury, éditrice
Guylaine Floury-Dagorn, docteure en civilisation latino-américaine et traductrice
David Franck, conseiller des Français de l'Étranger en Ukraine
Hélène Funck-Dloussky, fonctionnaire internationale retraitée
Georges Gonzales, ancien fonctionnaire des Nations Unies
Eugène Green, cinéaste et écrivain
Jean-Yves Guérin, professeur émérite de littérature française à l'Université Sorbonne nouvelle
Alain Hélou, galériste, ancien attaché culturel en Russie
Dr. Mieste Hotopp-Riecke, turcologue, directeur de l'Institut d'études caucasiennes, tatares et turkestanaises
Marie-Anne Hugon, professeure émérite
Jean-François Husson, professeur, Université Catholique de Louvain
Laurent Jaoui, réalisateur
Claire Kaiser, universitaire, université Bordeaux Montaigne
Konstantin Kaiser, poète, philosophe, chercheur de l'exile, www.zwischenwelt.net, Autriche
Gregory Kucherov, directeur de recherche CNRS
Océane Lagleyze, Juriste et auteur d’un mémoire universitaire sur les violations des droits de l’enfant au cours de la guerre en Ukraine
Gérard Lauton, universitaire (UPEC)
Bernard Latarjet, président d'établissements culturels
Sylvie Lindeperg, historienne, professeure des universités
Isabelle Macor, traductrice littéraire, écrivain, chercheur en littératures comparées (Le monde slave et l'occident)
Peter Mark, Emeritus Professor at Wesleyan University
Marie Matheron, actrice
David Noel, historien et président de la LDH 62
Alexis Nuselovici, professeur des universités émérite
Juraj Nvota, réalisateur slovaque
Guillaume Origoni, journaliste
Gérard Onesta, ancien vice-président du Parlement européen
Sergio Paoletti, professeur émérite de biochimie, Italie
Elena Pasca, philosophe, Roumanie
Michel Perrin, professeur d'université émérite
Piet, dessinateur de presse
Mireille Piot, professeur émérite des universités
Geneviève Piron, spécialiste du monde russe, directrice du Smith College, Genève
Sonja Pleßl, traductrice et publiciste, www.zwischenwelt.net
Olga Prud'homme Farges, réalisatrice et productrice
Patrick Puges, polytechnicien
Denis Querleu, professeur honoraire d'oncologie, visiting professeur au Policlinico Gemelli, Rome
Alain Rabatel, professeur émérite de sciences du langage, université Claude Bernard Lyon 1
Natacha Rajakovic, politologue, expert en relations internationales et communication stratégique
Anne Rasmussen, historienne
Antoine Rault, auteur dramatique et romancier
Marie-Pierre Rey, historienne
Nichole Robichaux, director of Advocacy in France for European Action for Ukraine, USA
Michel Rostain, écrivain
Olivier Roux, professeur d'université émérite
Cécile Sakai, professeure émérite
Christian Sautter, ancien ministre
Guillaume Sauzedde, militant, réalisateur du documentaire " De ma fenêtre - Carnets de Lviv "
Florence Samson, ambassadrice bénévole et officielle de la Fondation caritative ukrainienne Бонум de Lviv
Anne-Marie Schermann, directrice de recherche CNRS
Geneviève Schméder, professeur des universités
Stuart Seidd, metteur en scène
Constantin Sigov, professeur à l'Université Mohyla de Kyiv
Marie-Claude Smouts, directrice de recherche honoraire au CNRS
Philippe Souaille, producteur audiovisuel et journaliste
Béatrice Soulé, réalisatrice
Dr. Susanne Spahn, Expert des médias russes et de la désinformation, Université de Passa
Brina Svit, écrivaine
Jean-Claude Villemonteix, ancient diplomate
Olivier Weber, écrivain, président du Prix Joseph Kessel, ancien ambassadeur de France
Nicolas Weill-Parot, universitaire
Zina Weygand, historienne
Associations
Collectif Solidarité Ukraine 95
Vera Ammer, traductrice; membre de MEMORIAL Deutschland, Blau-Gelbes Kreuz, Lew Kopelew Forum
Patrick Angelvy, secrétaire général de Pharmaciens Sans Frontières 94
Oleksandra Bertin, présidente de l'association Ukraine Amitié
Annick Bilobran, présidente Advule
Christian Castagna, responsable de plaidoyer, Pour l'Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !
Zdravko Cerovecki, président de Croatie-Occitanie.fr
Florence Chambon, conseillère municipale, coordination Solidarité Ukraine 95
Mykola Cuzin, président du Comité Ukraine 33
Henri David, président de l'ARASFEC unis pour l'Ukraine
Xavier Grosclaude, président de l'Europa Club de France
André Klarsfeld, Secrétaire-adjoint de Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !
Jean Couthures, porte-parole du Mouvement des Progressistes
Yveline Le Montreer, association Tregor Solidarité Ukraine
Oxana Melnychuk, association Unis pour l'Ukraine
Anne Marleix, coprésidente de Terra Project
Florent Murer, président de l'Association Kalyna
Svitlana Poix, présidente de l'Association La Maison ukrainienne, Mérignac-Bordeaux Métropole
Marie Rebaud, administratrice Ukraine CombArt
llia Samotoi, président de l'association Solidarité Bretagne Ukraine
Bernard Schalscha, délégué général Urgence Darfour
Dominique Schnapper, sociologue
Nataliya Shevchenko, présidente de l'association Vilna.UA, Nantes
Christina Smoliy, présidente de l'association UKRAÏNKA à Limoges
Svitlana Spenlé, présidente de l'association d'intérêt général Women 4 Ukraine
Christian Tabiasco, président Mouvement Européen Morbihan
Knesia Trilleaud, présidente de l'association Ukraine, la liberté d'être libre
Laurent Vogel, chercheur en santé au travail, membre du RESU (réseau européen de solidarité avec l'Ukraine)
Othar Zourabichvili, président de l'Association Géorgienne en France
Signatures citoyennes :
Liste à jour en date du 1er septembre 2025, 08h00, UTC +1.
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